Jean Michel Kerne
Je suis le roi de ces îles
Jean-Michel KERNE (04/01/2011) – Textes brefs – « Je suis le roi de ces îles, le monarque impitoyable d’un peuple d’iguanes et de manchots » : ce titre de ma première rédaction de quatrième, lorsque j’étais interne au collège, m’avait coûté ma première heure de colle. Ah, maudit internat ! Je m’en évadai dès que le surveillant avait tourné les talons. Alors, en pleine nuit, j’escaladai la grille du collège puis celle du château voisin. Une nuit, je montais tout en haut du beffroi et aperçus au...
Lire plusJe me souviens
Je me souviens de la boutique avec sa grande baie et son carrelage encore mouillé. C’était un soir d’hiver ! Je me souviens du fournil dans lequel les toiles bises étaient accrochées aux pelles. Le grillon y chantait tout l’été ! Je me souviens de Fanou. C’était mon instit’ ! Le mardi, elle nous faisait écouter de la musique : Rossini ou Vivaldi mais aussi Bach ou Dvorak… Je me souviens aussi des deux énormes tilleuls qui étaient dans la cour de l’école. On pouvait se cacher à quatre derrière. Je me souviens...
Lire plusGiuseppe SAN VENITO
Assis sur le bord du trottoir, Giuseppe n’avait que huit ans lorsqu’il avait rêvé de bâtir le plus grand paquebot qu’il ferait naviguer dans le caniveau. Lorsque son corps fut retrouvé nu et ses entrailles dévorées par les vautours dans la vallée du Grand Canyon, seul le chasseur « nuage de la forêt » avait pu apercevoir ses haillons que traînaient quelques hyènes sans pitance, alléchées par les effluves du cadavre. Nuage de la forêt rêvait devant le feu, qu’il avait ramené son ami défunt dans le monde des...
Lire plusEmpressé
Le chat angora ronronne sur le voltaire. A côté, une armoire à glace fermée. En face, la fenêtre est ouverte. Les chants d’oiseaux emplissent la chambre. Le chat dresse l’oreille. Des pneus crissent. Une portière claque. Le chat s’étire, se dresse sur le fauteuil. Des pas se font entendre. Le chat se terre sous le lit. Il entre dans la chambre. Blotti à la tête du lit, le chat épie. Il avance vers l’armoire, il maugrée. Il ouvre la porte de l’armoire. Il marmonne, il enlève sa veste, la jette sur le lit. Il écarte les...
Lire plusEau d’Eon
A l’heure d’arrivée de l’autobus 666, l’héroïque citadine Eurythmique avait atteint la région des anneaux de Saturne et puis avait arrimé son vaisseau au bord de l’Etang noir. Elle avait plongé dans cette masse aqueuse amorphe et bleuie par l’étoffe d’un chevalier. Eurythmique recherchait son Accord-d’éon sans lequel aucune musique ne lui était audible. Alors, se glissant à travers deux rochers aveugles, elle pénétra dans une chambre dont la voûte était coiffée d’une tenture cosmique. Elle remarqua sur...
Lire plusChaussons étoilés
Dans son étable, la vache, Dans sa grotte, l’ours, Dans son terrier, le renard, Dans son écurie, l’âne, Dans sa chaumière, le vieux grand-père, Ce soir, chacun dans son trou noir Attendra le coup de trompette. Car, quand celui-ci retentira, Chacun, dans son trou noir, Pourra rêver à son enfance… Chacun va chausser son enfance pour se projeter dans la nuit… Chacun va retrouver son enfance pour se diriger Parmi les étoiles clouées au ciel Par le marteau d’une vertigineuse nuit ! Chacun va raviver la lumière pâle de...
Lire plusAurore, la nièce de Nicéphore.
A l’époque de la photographie naissante, la quantification des photons étant un travail vraiment ardu, Nicéphore avait embauché sa nièce pour déposer chacune de ces particules lumineuses sur la plaque de verre glissée dans son chromatographe anachronique. Ainsi, commença l’histoire sans fin d’une photo qui ne put voir sa fin achevée puisque Aurore compte encore les pixels sur son nouvel écran plasma, avec le zèle et l’assiduité de son aïeul ici présent, jouant la gavotte sur son piano à bretelle. Tandis que sa tante...
Lire plusAmour
L’amour, c’est comme un fifre, Certaines de ses mélodies Sont parfois stridentes ! L’amour, c’est comme un fusil de chasse, Il faut en posséder ou en éprouver Pour ne pas se sentir seul ou être bredouille… L’amour, c’est comme un télescope, Il te rapproche de l’invisible, Il te rapproche de l’inatteignable, Il te rapproche de ta bien-aimée Qui est déjà parmi les étoiles ! L’amour, c’est comme un arc, Il donne l’élan pour réaliser Tes rêves les plus insensés, Les plus osés, Les plus...
Lire plusA ton tour !
Tonton tonnait tant devant son écran Que tous les capitons du divan s’envolaient. Tonton s’étonnait en effet Quand Riton, tout engoncé, chantonnait : « A ton Tour, mettons les pitons Dans les pignons à biftons sans pistons ! Pendant que nous les tondus Agitons les mirlitons sans klaxons, Les flonflons du peloton résonneront A Château rompu ou à Issoudun. » Jean-Michel, sauf tonton (09/11/2010) – Textes brefs...
Lire plus« Le triomphe du jeune Boniface ».
Devant sa glace, Boniface sourit. C’est le jour J pour lui : J parce qu’il va rencontrer Jacqueline et J parce qu’il va lui dire qu’il l’aime. Mais il ne le sait pas encore, de même qu’il ne connaît pas encore Jacqueline, même s’il l’a déjà rencontré. Mais devant sa glace, il sourit quand même, Boniface. Hier, il a tiré à pile ou face. C’est face qui est tombé. Alors, il a décidé de rejouer avec une autre pièce : encore face ! Et une autre pièce : encore face. Et encore une autre pièce et encore face....
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