Attendre…

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15 / 04 / 2015
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Attendre quoi ? Attendre Qui ?

Regardons, écoutons les enfants ; qu’attendent-ils ? A quoi rêvent-ils ? Si l’on en juge par les étalages des magasins de jouets et grandes surfaces, le rêve s’installe un peu partout ; sauront-ils attendre patiemment la féerie de Noël ? On s’y sent déjà ; en attendant, on feuillette les catalogues de jouets, on discute avec les copains et copines et bien des parents succombent avant les enfants sous prétexte que les achats seront faits et qu’on n’aura pas besoin de courir les magasins à la dernière minute. Alors on verra des chambres d’enfants devenues des magasins de jouets, certains encore neufs parce qu’ils n’ont intéressé personne , d’autres abandonnés parce que les achats fréquents de piles sont coûteux ou parce qu’on « attend mieux » : un téléphone portable dernier cri, indispensable, l’ordinateur nouveau plus performant, la télé dans sa chambre et que sais-je encore ? Nous, enfants, ados, n’avons pas eu les mêmes attentes que la jeunesse actuelle. Mais pouvons-nous dire ce que, nous, personnes âgées, attendons maintenant ?

J’attends que le jour se lève avec l ‘espoir d’un ciel plus clément aujourd’hui qu’hier et un rayon de soleil qui me dit que je suis vivante ; j’attends, impuissante, de meilleures prévisions de la météo dans les départements durement touchés par la violence des eaux ; j’attends la visite de quelqu’un que j’aime ; j’attends la fin de la « présentation des menus » du samedi, surprise encore par les choix difficiles des résidents indécis ; j’attends une rapide connexion de mon ordinateur pour envoyer et recevoir les mails attendus. A la résidence, nous avons attendu l’installation du nouveau jet d’eau qui anime « l’espace jardin » et l’isolation phonique de la salle Paul Bert qui doit nous apporter un peu plus de calme au moment des repas ou des ateliers. Combien de fois dans une journée avons-nous prononcé ce mot « attendre » ? Ailleurs, le jardinier attend la pluie, l’agriculteur attend le soleil qui fera mûrir les épis ; les touristes attendent la fin de la grève des pilotes pour profiter de quelques jours de vacances hors des villes polluées…

Dans une existence, nous avons passé des milliers d’heures à ne faire que cela : attendre ! Qui n’a pas attendu sur un quai de gare, dans une longue file avant d’entrer dans un musée, pour faire la queue devant la boulangerie pendant les années d’occupation et s’entendre dire : « plus de pain » ! Qui n’a pas attendu les résultats d’un examen médical et de l’opération qui a suivi, la guérison après une longue maladie, le retour d’un enfant ou d’un mari obligé de se déplacer à l’étranger, le résultat tardif de séries d’examens et concours pour accéder à un nouveau poste ? On attend toujours et partout ! Reconnaissons pourtant qu’il est des attentes enrichissantes ; n’est-il pas merveilleux et redoutable à la fois d’attendre la naissance d’un enfant ? On se réjouit, on doute aussi, on s’émeut lorsque l’enfant bouge, toutes les espérances sont permises : il sera grand, elle sera belle, il sera dynamique, elle est un peu trop calme !… Mais où est donc la surprise quand l’échographie révèle la vie secrète de votre enfant ? Ce qui compte, n’est-ce pas d’avoir toujours quelque chose à attendre ?

Attente joyeuse, oui ! Mais aussi grande inquiétude et souffrance dans l’attente d’une fin d’épidémie comme Ebola ; attente interminable et douloureuse du condamné à mort «  seul dans une cellule minuscule, guettant les pas des gardiens et le tintement des clés qui s’approchent, qui chaque matin se demande si son tour est venu, s’il va être exécuté aujourd’hui », quelque part dans le monde.

L’humanité entière est dans l’attente ; c’est peut-être ça l’Histoire ! Collectivement, on attend « la fin de la crise, la reprise », la paix quand éclatent les conflits, la raison pour les nations et leurs dirigeants, la fin d’un fanatisme qui fait dérailler les esprits et les cœurs, le recul des égoïsmes pour faire place à l’esprit de service. Pour cela, il nous faut apprendre à attendre sans désespérer, même si nous ne pesons guère sur les événements ; n’est-il pas réconfortant d’apprendre que des gens se bougent, que des générosités s’organisent et que, dans l’ombre, des gens formidables mènent « les bons combats » ; en attendant, la seule arme dont nous disposons c’est la patience. La terre qui tourne autour du soleil nous donne une leçon : c’est l’alternance jour-nuit, soleil et ombres et tous les ans si l’hiver nous fait douter de tout, chaque année le printemps revient ; on se prend à rêver : combien de printemps reverrons-nous ? En attendant … attendons !

« Rêver c’est le bonheur, attendre, c’est la vie ! » Victor Hugo

Avril 2015 – Textes courts – Marité G.

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