Voyage imaginaire à travers une carte

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06 / 07 / 2012
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Il avait longtemps suivi les berges du Fleuve Mouillé.

Il était déjà passé par là dans une autre vie, c’était sûr, son nom sonnait comme une évidence…

Et puis les fleuves finissent toujours par mener quelque part, il n’avait qu’à suivre le cours !

La première épreuve décisive fut le franchissement du Pont Noir, simple petit point noir sur la carte, aventure redoutable en réalité, petit pont de planches noires suspendu par des cordages au dessus d’un aplomb de cent mètres.

Chaque pas tremble et vacille sous vos yeux incertains…

D’un coté, des marais à n’en plus finir.

Vous sentez que vous perdez pied si vous vous aventurez plus loin…

De l’autre, en contrebas du pont, avec leurs cris de guerre qu’ils poussent comme des fous comme pour vous inciter à ne pas traverser, une horde de marmots sauvages vous invective en passant et ricane de vous…

Il fallait être fou pour continuer…

Il se dit que c’était là son meilleur laisser passer, entre fous, on peut toujours s’arranger !

Il laissa de coté la ville fortifiée de ZECHIEL, ayant dans son enfance trop bu de fortifiants et soupé de lectures bibliques aux étranges consonances mal digérées…

Il arriva d’instinct dans cette zone tribale couronnée par le petit village insolite de Limertash, où le soleil se couche à l’Est et les valeurs sont inversées.

Les indigènes, se nourrissant essentiellement de pêche, fruit de leur passion et non de leur travail, nouent avec la Grande Mer une telle relation de confiance et lui vouent un tel culte qu’ils évoluent en son milieu comme poisson dans l’eau.

Ils vivent dans de petites barques, toutes serrées les unes contre les autres comme autant de petites taches en ligne, et passent le plus clair de leur temps à pêcher, libres et tranquilles, faisant ce dont ils ont toujours rêvé.

Il aurait bien aimé rester !

Mais il était trop différent, il était né à l’Ouest, toujours pressé et contraint, il courait toujours après ses rêves et eut peur de s’ennuyer…

Dans le village, on lui avait dit qu’en suivant la côte, il parviendrait à un pont lui permettant d’atteindre sans encombre la Forêt Scabreuse, juste avant les premiers contreforts du Mont Balèze.

Ce lieu sonnait comme un défi à la hauteur de ses espérances, nourrissant son imaginaire des aventures les plus folles dont il sortirait toujours vainqueur.

Oui, l’on verrait de quoi il était capable, et qui était le plus fort !

Arrivé au détroit qui fermait le passage, le pont avait été emporté au dernier orage.

Restait la solution de traverser à la nage, mais à la vue des guérilleros armés jusqu’aux crocs qui avaient investi de l’autre coté les anciennes mines de plomb, et craignant peut-être d’avoir à prendre lui aussi un peu de plomb dans l’aile ou dans la cervelle, il préféra l’option plus coûteuse en temps et en argent de longer le Lac Noir jusqu’au Pont du Péage, d’autant qu’il passerait tout près d’une Mine d’argent, et qu’ infailliblement, il pourrait se renflouer…

Sur les arides Plateaux du Vent Sec, il ne tarda pas à se trouver complètement à sec, alors il vendit tout ce qu’il avait jusqu’à sa dernière chemise, puis son âme et son corps jusqu’au dernier orteil et au gouffre du dernier oeil

Arrivé à cette extrémité, il sombra dans un profond trou noir et pensa être arrivé au terme de son voyage, mais, recueilli et enseigné par un moine du Monastère de la Grande Broute, il reprit du service, d’abord comme bouc émissaire, où de belles rencontres dans ce lieu retiré lui firent prendre de la hauteur par rapport aux aléas de la vie et l’on raconte aujourd’hui qu’il vit en ermite depuis des lustres sur le versant Est du Mont Petit éclairant de sa sagesse toute la vallée.

 07 juin 2011 – Ludotextes & Textes courts – Louis Mancy

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