Je sentais bien que ça allait venir

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31 / 05 / 2013
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Je sentais bien que ça allait venir
Dans ce pays mien que j’avais mis tant de hâte à fuir
J’y retournerai pour ne plus souffrir
J’irai frapper à la porte de mon enfance
Et j’attendrai en silence
Un signe une voix comme une délivrance
Je regarderai à travers la fenêtre
Et ma mère sera là assise à la main une lettre
Elle sera de moi peut-être
Elle lira tous les mots qui se cognent en cadence
Que j’ai hurlés comme une urgence
Mère j’ai froid, je reviens de la bas, ouvre-moi
Entoure moi ton fils est si las, lave mon âme de ses effrois
Baigne mon cœur de chaleur et de douceur
Autour, que douleurs et trépas
Mère lève les yeux je veux les voir
Qu’ils me content encore que je peux croire
A une route qui mène mes pas loin du noir
Vers les chemins soleil que tu dessinais le soir
Quand la nuit s’avançait et que je devenais sa proie
Mère j’ai couru et couru encore
Plus loin pour distancer la mort
Mais elle s’incrustait souvent aux aurores
Quand ivre de vin de femmes et d’oubli
Je m’écroulais rendant les armes à mon ennemie
Devant sa fenêtre la mère rêve la lettre lui glisse des mains
Elle marche tête à l’envers tête ailleurs tête sans lendemain
Elle plonge à plein cœur dans des étés des printemps
Elle ne sait plus que deux saisons le beau temps le temps d’avant
Les tilleuls sont lourds de senteurs de bonheur
Elle doit tendre la toile et ramasser leurs fleurs
L’angélus a sonné il est sept heure la bonne heure
Au loin déjà elle aperçoit des nuées
Vite son petit va bientôt se réveiller et l’appeler
Il faudra encore qu’elle lui dessine en couleurs
Un arc en ciel pour rallumer ses yeux chagrins qu’ils soient rieurs
Elle entend dans la grange lourde et chaude du foin rentré hier
Son mari qui fredonne leur chanson leur secret leur monde leur univers
Les nuées sont proches elle sent comme un étourdissement
Des amis perdus lui murmurent des mots qui sont emportés par le vent
Le vent fou le vent d’autan comme avant quand elle courait
Qu’elle courait en hurlant au vent
Je suis vivante j’ai vingt ans

Son fils est derrière la porte il a grandi
Mère mère mes jours sont gris repeins moi le soleil il s’est terni
Je ne sais pas faire semblant comme tu m’avais appris
Ils disaient qu’ils étaient mes amis
Mais ils sont là derrière moi c’est leur dernièr hallali

Sa mère a souri s’est ébrouée levée
Sa douleur depuis ces tourments s’est estompée elle l’a remisée
Dans des tiroirs cachés elle a jeté les clefs
Elle s’est maquillée de nuances colorées
Son cœur a peine fendre ne s’est pas éparpillé émietté
Non il a continué
Juste pour se souvenir d’avant et des tilleuls de l’allée
Juste pour être sur qu’ils ont bien existé
Elle ouvre la fenêtre ferme les volets
Il est temps de monter et de se coucher
Un souffle la frôle , un ange est passé

29 mai 2013 – Poésie – Cécile Gibier

 

 

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