On disait de lui qu’il avait tout raté…

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16 / 05 / 2013
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Effondré dans l’un des fauteuils de la bibliothèque, un verre de whisky à la main, Edwin était complètement anéanti. Cette soirée lui avait semblé interminable.

 Dés le début du dîner, servi dans l’élégante salle à manger, il s’était senti mal à l’aise. Des regards de connivence s’échangeaient entre les invités, des phrases se chuchotaient dans son dos. Il avait compris qu’une rumeur circulait : on disait de lui qu’il avait tout raté et qu’il était complètement ruiné.

 Aveuglé par l’appât du gain, il avait accordé sa confiance à un homme d’affaires glauque qui, peu à peu, l’avait entraîné dans des pratiques financières risquées et illégales. Et en plus, ses derniers placements en bourse s’étaient avérés catastrophiques, au point de mettre en péril le patrimoine familial. Depuis une quinzaine de jours, ses banquiers le harcelaient, ses créanciers l’étouffaient sans pitié et il ne voyait plus aucune issue à ce véritable cauchemar.

 Sa situation personnelle n’était pas plus reluisante. Après deux années de bonheur factice, son mariage prenait l’eau de toutes parts et faisait de lui la risée de la ville et des environs. Quant aux ragots concernant le comportement de son épouse dans certaines soirées « privées », il préférait ne même pas y penser…

 Comment était-ce possible ? Comment avait-il pu être aussi naïf ? Comment avait-il pu en arriver là ? Comment allait-il rembourser le montant colossal de ses dettes ?

 Il but son verre d’un seul trait et prit son visage entre ses mains. Il avait l’impression affreuse d’être au bord d’un précipice. Il suffisait d’avancer d’un seul pas… d’un minuscule petit pas… pour que tout soit fini… absolument tout…

 Soudain, il se ressaisit et se redressa. Sa décision s’imposa, claire, limpide, évidente. Il monta à l’étage, attrapa un sac de voyages dans lequel il mit rapidement quelques affaires, redescendit dans son bureau et rassembla tout l’argent qui lui restait.

 Il commença à écrire une lettre pour ses proches, puis il se ravisa. C’était inutile. Aucun d’entre eux n’était capable de le comprendre. Aucun. Il leur donnerait peut-être des nouvelles plus tard. Il verrait… Dans l’immédiat, il fallait quitter cet endroit et sauver la seule chose qui lui restât sur cette terre : sa vie.

 Il fallait fuir loin, aussi loin que possible. Loin de cette existence de frime, de faux-semblants qui n’avait plus le moindre sens. Loin de ces hypocrites, ces courtisans grotesques, ces parasites, ces sous-fifres qui s’étaient ligués contre lui pour le mener à sa perte. Il les détestait tous autant qu’ils étaient ! Loin surtout de « cette femme », cette créature dépravée et malfaisante ! Il la méprisait ! Il la haïssait au plus haut point !

 Il n’avait pas le choix.

Il prit son sac, ouvrit la porte-fenêtre et se glissa silencieusement dans le jardin jusqu’au grand portail.

 Dehors, l’air était rempli de mille parfums. La lune rassurante brillait de tout son éclat dans un ciel constellé d’étoiles. C’était une magnifique nuit d’été.

9 avril 2013- Textes courts – Sylvie Antoniw

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