Bouteille à la mer

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29 / 02 / 2012
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Bouteille à la mer. Telle était la consigne pour cet atelier à « Mémoires de Bourgogne ». Exactement elle demandait de s’imaginer dans un monde inconnu, abordé indépendamment de sa volonté, et de rédiger un message pour ceux de chez soi, de le placer dans une bouteille et de le jeter à la mer. Voici les textes qui répondent à cette consigne. 

 Je ne m’imagine pas naufragée sur une île déserte ou sur un radeau à la dérive ! J’ai pourtant connu, au cours de ma déjà longue vie humaine, des naufrages à la suite desquels j’ai été rescapée : naufrage des maladies graves , naufrage des deuils, naufrage des échecsnaufrage au cours d’un voyage inoubliable qui a failli me coûter la vie dans un canyon péruvien .

Aujourd’hui, me croyez-vous ? Je suis à nouveau une naufragée, naufragée de l’âge ; Bernard Pivot, lui, parle de « l’apartheid de l’âge ».

Je ne cède pas au pessimisme, mais décider d’une entrée en maison de retraite en toute lucidité, c’est déjà se lancer dans une aventure sans en connaître tous les risques.

Le jour où l’on se retrouve au milieu de visages inconnus, vieillis, abîmés, troublants, naufrage ! Dans la solitude d’une chambre où presque rien ne vous appartient, naufrage ! Vu de l’extérieur quelqu’un m’a dit : « que viens-tu faire dans cette réserve de vieux  » ? Sans la présence du mari disparu avec qui j’ai partagé soixante ans de vie, la dépression guette et le naufrage devient vite abandon ; pas de bouteille à la mer, semble-t-il ; on se met à croire que « la vieillesse est un naufrage« , ce que pensait Charles De Gaulle qui en avait vu d’autres ! Pourtant, je ne sais ni pourquoi, ni comment, je la découvre cette bouée de sauvetage : des pensées très fortes pour les miens, enfants protecteurs, petits-enfants affectueux, arrière-petits-enfants pleins de tendresse et tous les amis fidèles, ceux d’hier et ceux d’aujourd’hui ; tous m’aident à rester vivante et à espérer encore quelques saisons « en usufruit ».

Mes derniers appels seront-ils compris quand mes forces de vie faibliront et que je serai perdue au milieu de tous les naufragés de « Mémoires de Bourgogne » ? J’ai confiance en mon étoile qui me permet de rêver d’un pays merveilleux où le printemps éclate en cri de joie. Le rêve est sauveur et nous aide à croire en la vie ; « la vie c’est l’esprit et l’esprit ne se laisse enterrer dans rien » (Christian Bobin)

 27 février 2012   Marie-Thérèse G.

 

Nous étions partis pour le Japon, avec l’espoir de connaître les us et coutumes de ces étrangers pour nous, lorsque le fameux tsunami eut lieu : quelle catastrophe et quelle peur ! Nous avons pris armes et bagages pour nous éloigner de la région sinistrée, bien sûr en nous tenant informés des suites de cette aventure aux proportions mondiales.

Nous sommes à l’abri maintenant, attendant le navire qui nous rapatriera.

Je vous rassure, dîtes à tous que nous sommes sains et saufs, mais comme il n’y a aucune communication, je vous confie un message, dans cette bouteille que je vais lancer à la mer, avec l’espoir qu’elle arrivera dans un port, n’importe lequel. Je donne votre adresse et numéro de téléphone, et peut-être une âme charitable vous fera parvenir le message, s’ il est lu.

Remerciements et à très bientôt j’espère

signé Jeanne G.

 

être seule dans une île déserte, voilà ce qui m’arrive, après le crash de l’avion qui nous transportait. Nous partions en vacances quand un bruit épouvantable fit remuer l’avion, puis ce fut la descente vers la mer. J’ai pu m’accrocher à un objet flottant, puis, à la nage, rejoindre la côte assez proche.

Et me voilà sur cette plage, seule, désespérée, essayant de me raccrocher à ce petit papier et à cette bouteille, en espérant qu’une personne les trouvera et viendra à mon secours.

Édith L.

 

Au cours du voyage, par la faute du capitaine, nous nous trouvons dans une île inconnue de nous. Le capitaine, enfuit avec toutes les cartes et instruments de navigation dans une barque, nous coupe de toutes les chances de connaître notre position. Nous espérons trouver quelques indications en explorant le terrain et les environs. Les résultats sont maigres ! Dans les environs d’une cabane en ruine, un rayon de soleil me fait découvrir une bouteille, et son bouchon de liège, ainsi que des rognures de papier. Seule solution pour nous, lancer une bouteille à la mer, avec un message.

Le temps passe, la faim nous tenaille et le jour baisse. La nuit sera bientôt là, et nous serons dans la plus totale obscurité, de toutes les manières !

Recroquevillés dans la cabane, serrés les uns contre les autres, nous espérons trouver le sommeil et l’espoir.

Brutalement, au ras de l’eau, une lampe brille sous la lune.

Tous nous nous redressons et retrouvons l’espoir ! Réalité ou leurre ?

Christiane C.

 

 

 

 

 

 

 

1 Commentaire

  • Denise Pézennec

    Marie-Thérèse, vous m’avez émue. Ce naufrage que vous évoquez, âge, maison de retraite à envisager, j’y pense moi aussi, parfois, pour dans quelques années.Mais votre écriture même est la preuve que vous n’êtes pas encore une « naufragée » et je pense sincèrement que cet entourage affectif que vous avez la chance d’avoir, tout comme moi (arrière petits enfants en moins) ne permettra pas que vous viviez ce naufrage .Vous ne serez jamais seule et abandonnée, vous êtes lucide mais gardez votre optimisme. Il y a encore beaucoup de joie de vivre en vous et de bonnes raisons pour cela. Avec toute mon amitié.

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