Prélude de Chopin

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05 / 11 / 2011
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PRELUDE DE CHOPIN

Consigne :Un clavier d’ivoire, des doigts agiles, le parfum du tilleul par la fenêtre ouverte, un tissu qui glisse sur la peau, un rire frais au loin, un bruissement du bief sous les saules, une courte pointe en patchwork, des sorbets de fruits frais, un après-midi de temps libre, libre, libre….

 

Tout est trop joli autour de moi.

Ne manque que le chant des rossignols et le rayon de soleil entre les volets clos.

À quoi sert de décorer sa tristesse ? Ridicule, ce trompe- l’œil rural…

Rien ne peut consoler mon chagrin.

Eden anachronique.

Je n’aime pas les sorbets, je veux de la glace. Avec plein de chantilly.

Je veux un musicien devant ce clavier et je veux ses doigts ailleurs.

Même dans une déchetterie en novembre au Tréport, je serais mieux qu’ici.

Paradis artificiel, ce gîte paumé en Ardèche. Cinq étoiles n’éblouissent que les imbéciles heureux.

Chopin m’ennuie à mourir… Mélopée trop classique pour chatouiller mes hormones.

Comme si un parfum, un textile ou un rire pouvait apaiser mon volcan.

Ce bonheur nébuleux offense ma peine. Lourde peine, encore dimanche à supporter.

Je vais fracasser ce piano arrogant, à la hache.

Je vais abattre le tilleul centenaire, fusiller les marmots qui ricanent, liquéfier les sorbets insipides dans l’évier et déchiqueter la courtepointe écossaise.

Carte postale bucolique, ça me déchire.

J’aurais dû choisir une cure de sommeil à Livry-Gargan…

Ou rester, dans mon studio à Aulnay.

Fuir ton absence, l’emporter loin….Délivrance de pacotille. Je suis libre, si libre, trop libre.

Et j’ai mal.

J’aimerais tant que tu m’attaches. Au tilleul centenaire même.

Que tu me ligotes avec cette étoffe, si provocante de douceur.

Changer d’humeur en changeant d’air ? Écueil de sédentaire. On embarque toujours tout, même aux Maldives. Pire à Venise.

Mais qu’est ce que je fais là ? Dans ce tableau impressionniste trop fleuri…. J’aime pas Giverny…

Heureusement qu’il n’y a pas de nénuphars au milieu de la mare.

J’veux qu’on m’écorche. J’veux Soutine et son rouge.

24 mai 2011 – Textes courts –  Marie Claude Contrault  

 

 

 

 

 

 

 

 

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