Sylvie et les extraterrestres -3-

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02 / 11 / 2011
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 Sylvie avait terminé son atelier d’écriture bi-mensuel. Comme d’habitude cela avait été un peu stressant devant les nouvelles consignes mais rapidement elle avait su tirer son épingle du jeu. Ses compagnons avaient encore ri aux éclats en écoutant ses nouvelles trouvailles . Bruno, le maître d’écriture l’avait regardée avec bienveillance. Du moins c’est ce qu’elle avait cru comprendre lorsqu’à la fin de la lecture de son texte, il avait plissé les yeux et roulé son épaisse moustache en pinçant les lèvres , signes habituels d’une certaine satisfaction. L’écrivain n’adressait jamais de critique sévère. En effet il souhaitait avant tout ne pas décourager ses élèves qui mettaient tant de passion et d’enthousiasme dans leur modeste création. Malgré tout il essayait d’éviter toute flagornerie, ce n’était pas dans son éthique. Le commentaire ou l’analyse n’étaient pas obligatoires, et un « très bien Sylvie » suffisait à rendre cette dernière heureuse. Bref, la vie était belle. Jamais elle n’aurait imaginé qu’écrire des petits textes et surtout les lire devant tout le monde pourrait lui donner autant de bien-être. Elle n’avait même plus besoin d’aller chez le psychanalyste qu’elle consultait sans résultats depuis des années. Elle rentrait à pied chez elle comme d’habitude, sans crainte, dans les ruelles peu animées de la petite ville. Elle se demandait encore qu’elle était l’origine de ce sifflement qu’elle avait perçu pendant la soirée quand, passant à côté de la grille d’un jardin sombre, quelqu’un l’interpella doucement par son prénom.

« SYLVIE, COUCOU, SYLVIE, N’AIE PAS PEUR, C’EST MOI ELECTRON »

Électron ne voulait pas effrayer sa proie, et il avait utilisé les mots qu’on lui avait appris pour rassurer la petite humaine. Jusqu’à présent leurs relations avaient été simplement épistolaires. Sylvie naviguait en effet souvent sur Facebook pour rencontrer ses nombreux amis. Le jour où elle avait été contactée par Spock par l’intermédiaire d’Électron, elle avait d’abord été intriguée, puis elle avait pensé qu’il s’agissait d’un canular. Puis elle se mit à prendre goût à cette rencontre du troisième type. Ensuite elle commença à avoir peur. Elle n’arrivait pas à contrôler un sentiment d’angoisse inexplicable, se réveillait en pleine nuit couverte de sueurs, et même à son travail elle faisait preuve d’étourderie , orientant tel visiteur dans le mauvais service, faisant preuve parfois d’agressivité envers tel autre sous prétexte d’un léger retard au rendez-vous. Même la sœur de Sylvie se faisait rabrouer et c’était quelque chose de tout bonnement incroyable quand on connaissait leur connivence habituelle. Il était possible que Sylvie ait peur tout simplement d’elle-même. Dès qu’elle allumait son ordinateur elle tombait sur le portrait de Spock qu’elle avait mis sur la page d’accueil et son cœur se mettait à battre, en même temps qu’elle le contemplait longuement. Elle adorait la couleur jaune-brun de sa peau, ses longues oreilles pointues , ses sourcils droits et sa coupe de cheveux au bol. Elle soupirait . Pouvait-on tomber amoureuse d’un extra-terrestre?

Sylvie s’était arrêtée et n’éprouvait bizarrement aucune frayeur, elle essayait de deviner d’où provenait cette voix si particulière qui l’appelait si doucement. Entre les arbres du verger elle aperçut quelque chose de luisant d’où provenait une drôle d’odeur. La grille du jardin céda facilement à la poussée.

1er novembre – ludotextes- Didier Laurens

 

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