Sylvie et les Extraterrestres (5 )
Et puis il y eut l’atelier d’écriture suivant. Jean-Claude était arrivé le premier mais il n’était pas accompagné de Sylvie comme à l’accoutumée. Il faisait grise mine lorsqu’il nous expliqua que sa camarade n’était pas réapparue au travail depuis deux semaines et sans explication. Elle n’avait produit aucun arrêt de maladie, elle ne répondait pas au téléphone. Par acquis de conscience il était allé à son domicile mais pas de signe de vie même après avoir longuement sonné à la porte. Il avait juste été gêné par une drôle d’odeur qui semblait venir de l’intérieur du logis et qui s’infiltrait sous la porte. Il ne savait pas pourquoi il était resté longtemps derrière cette porte, finissant même par s’asseoir contre le chambranle et s’endormir. Réveillé par son téléphone portable, il se demanda ce qu’il faisait là, constata que la nuit était tombée et qu’il était frigorifié. Il n’y avait plus d’odeur et regardant l’heure, s’aperçut qu’il était temps de rejoindre ses amis d’écriture, mais bredouille.
Dans la petite salle d’ordinaire si chaleureuse où chacun venait se réfugier pour son passe-temps favori, l’ambiance était plombée. La lecture rituelle ne s’était pas faite en raison de l’absence de Sylvie, la responsable. Le chef de la troupe n’arrivait pas à égayer ses ouailles, tout le monde attendait en sirotant sa boisson chaude et en chuchotant par petits groupes, personne n’espérait plus l’arrivée de Sylvie. Ce fut le moment où Didier annonça la nouvelle. Il avait reçu un message provenant d’une autre galaxie! Bien entendu ce fut un énorme éclat de rire et cela eut le mérite de faire fondre la glace. Une fois le brouhaha éteint, afin de convaincre son auditoire, il fit passer de main en main une feuille de papier où il avait transcrit une sorte de message codé incompréhensible. Seule la signature était bien lisible : Capitaine Spock. A l’évidence il y avait une relation avec la disparition de Sylvie. Usant d’onomatopées chacun y allait de son commentaire . Philippe méprisant, se demandait de quel navire ce Spock pouvait bien être le capitaine, et doutait de ses capacités à traverser même le golfe du Morbihan. Jean-Michel renchérissait : Spick et Spock sont sur un bateau, Spock tombe à l’eau qui est-ce qui reste? C’est une histoire qui a du piquant n’est-ce pas? Fou-rire général. Colette considérait que socialement ce Spock n’était pas prêt d’être intégré à notre communauté vu ses difficultés lexicales mais elle était prête à reprendre du service pour l’aider. Laure estimait que l’auteur de la missive avait tout de même quelque chose de romantique, voire de désespéré dans sa tentative de communication. Betty hésitait à traduire Xkmsxk, pouvait-on l’interpréter comme amitiés ou comme condoléances? Marie-Claude, pétulante, montrait son impatience devant cette pléthore d’interrogations. Denise quant à elle trouvait que la syntaxe n’était encore une fois pas respectée et Jean-Claude ne pipait mot rongé par une sourde prémonition. Il était d’une pâleur transparente ce qui faisait craindre qu’il ne tombe dans les pommes. Bruno regardait son petit monde s’agiter et n’ était pas mécontent de la tournure que prenait les choses, finalement tout était bon pour stimuler la créativité. Après un instant d’incrédulité, il fallut bien admettre que cette missive était à prendre au sérieux et que la fiction rejoignait peut-être la réalité.
21 novembre 2011 – nouvelles- Didier Laurens
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