Ce n’était pas pour Rimbaud…
Extraits de journal de voyage : Vous avez accepté de partir à Charleville-Mézières sur les traces du poète Arthur Rimbaud, avec un(e) ami(e) de plume. (tirage au sort)
Racontez : Au choix : vous y allez sac à dos et pataugas ou à bicyclette.
12 avril 2018.
Ce n’était pas pour Rimbaud, dont j’avais dû, un jour, effleurer quelques extraits de l’œuvre, et dont j’étais un peu confus, à ce jour, qu’il ne m’ait pas laissé de plus vivants souvenirs…
Ce n’était pas davantage pour Charleville-Mézières, ex cité minière nichée au fond des Ardennes, dont la crainte de tout fonctionnaire était un jour d’être un jour promu, ou pire encore, simplement muté là-bas…
Non ! Si j’étais là ce matin, pataugas aux pieds et sac au dos, ce n’était même pas pour le bonheur et le plaisir si souvent éprouvés de marcher.
Si j’étais là ce matin, en si bonne compagnie, c’était, bien sûr, qu’elle avait su trouver les mots pour me convaincre et me séduire, et j’avais accepté sa proposition sans l’ombre d’une hésitation.
Le pari, sans être complètement fou, était quand même un peu osé !
Pas le moindre questionnement ne me vint sur les chances que nous avions réellement d’aller au bout. Le plus long des voyages commence par un pas !
Nous voici donc partis, tous deux, à faire un bout de chemin ensemble !
Je sentais, intuitivement, et elle aussi sans doute, que ça pouvait le faire…
Oh ! Peut-être pas jusqu’au bout du monde, non, mais jusqu’à Charleville-Mézières, alors que d’autres auraient plutôt choisi Cannes ou Saint-Tropez…
L’idée me séduisait. Marcher à contre-courant ! A notre rythme, pas en courant. Peut-être pas pour l’extase des soleils couchants sur la mer…Pour la beauté des choses, paysages intérieurs, pour la beauté du geste, de l’instant partagé, tout simplement…
Le bonheur n’est pas une destination, il est parcours et cheminement…
15 avril 2018.
Dans cette petite localité au nord-est de l’Yonne, chère à son cœur, mon amie marque une pause et m’offre dans ses yeux un si beau ciel d’azur !
« C’est un trou de verdure où chante une rivière… »
Reine en alexandrins, que réchauffe sa voix aux accents de son cœur, elle m’emmène en voyage sur les bancs du lycée… Et dans ses vibrations, remonte à ma mémoire, les yeux au bord des larmes, le souvenir vivant du « Dormeur du Val ».
Un vent de poésie se lève sur les terres ondoyantes alentour, et les colzas en fleurs butinent à qui mieux- mieux sur les vagues ourlantes de cette mer immense, bateau ivre qui tangue…
Les souvenirs reviennent les uns après les autres, tendres et cocasses, d’autres plus graves, tous empreints de gaîté, vivacité, humour, et chargés d’émotions…
Aux tremblements répétés de sa voix, mes pas, légers, s’effacent…
16 avril 2018.
Arriverons-nous à Charleville-Mézières ? Est-ce pour demain ? Ou bien hier ?
Qu’importe !
Nous sommes là, ensemble, amis de marche et de cœur, nous ouvrant l’un à l’autre aux pas de l’essentiel, à ce qui fait poids en nos vies, et leur donne du sens…
Nous sommes jeunes, et nos rêves ont vingt ans, notre soif intacte et grande de parcourir le monde…
20 mai 2018.
Nous avons marché ainsi longtemps, attachés l’un à l’autre, dans un lien hors du temps, sans sentir la fatigue ni le vent…
Quelle belle, belle idée tu as eu là, en me demandant de t’accompagner, d’avoir choisi d’aller fêter cette année là, ton anniversaire, Denise, à Charleville-Mézières !
30 janvier 2018 – Textes courts – louis Mancy