Plein Sud !

Bruno nous donne la consigne : plein Sud ! Mais je dirais : plein les yeux et autre organe de mon corps !

À la moindre intonation du mot  Sud, mon cœur palpite, mes yeux se mouillent et mon esprit s’échappe, mais mon dieu qu’elle est belle, cette escapade !

En un seul battement de cil, je suis sur la Place de l’Air, célèbre place du village de mon enfance.

Ils sont tous là : Dédé, Gino le Sicilien, Gallinette, Ruggieri, Pépé Palmari, Marcel et tous mes pépés adorés, mes pères spirituels, ceux qui m’ont appris beaucoup, en peu de temps.

Comment oublier le ventre ouvert des platanes de la place et le boulodrome qui énerve les parisiens, qui n’arrivent pas à pointer près du bouchon ?

Mais ce qui les insupporte le plus ces fadas, c’est le chant harmonieux qui vit en nous, à tel point que mesdemoiselles les cigales le chantent !

Et Michel le Marseillais qui monte tous les jeudi après midi de l’Estaque, et qui me ramène, pratiquement à chaque fois, des chichis et des panisses, le plus important étant pour nous de se les partager.

On pose nos boules, Pépé Palmari et mon père vont à 50mètres de là, au foyer des anciens, chercher café et autres boissons.

Le pastaga, ce sera pour le soir, avec le rosé bien frais qui accompagnera la sardinade que l’on a pêchée ce matin avec Émile, au large de Carro, sur ce bateau que chez nous on appelle un Pointu.

On avait « fait » huit kilos pour la soirée, quand soudain Alex me dit « regarde ! »

Et je m’aperçois que je suis ici, à Joux !

Mais c’est sûr, monsieur Bruno, un de ces quatre matins, je partirai « Plein Sud » !

2013 – textes courts – Mag